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MAITRES, VOUS AVEZ 12 MINUTES

MAITRES, VOUS AVEZ 12 MINUTES

Publié le : 14/10/2016 14 octobre oct. 10 2016

C’est bizarre, le divorce.

Le mariage aussi, vous me direz. Les petites filles en rêvent, on le prépare pendant des mois voire plus d’un an, on fait faire des costumes sur mesure, on s’engueule avec ses parents et futurs beaux-parents, on se fait faire des coiffures pas possibles… et puis pfuittt !  La cérémonie civile passe à toute vitesse et la soirée je ne vous en parle pas. Heureusement qu’on s’est un peu ennuyés à la messe pour trouver ça long.

Le divorce, c’est un truc dans le même genre. On le rumine pendant des mois voire plus d’un an, on taille des costards sur mesure, on s’engueule avec ses parents ou beaux-parents, on a les cheveux en pétard… et puis pfuitt ! Le jour de l’audience arrive, ça dure quelques minutes et c’est déjà fini.

Deux événements majeurs de la vie, fondateurs de la vie personnelle et de la famille – qu’il s’agisse de la composer, la décomposer, la recomposer.

Le sentiment de débâcle au sortir de l’audience n’a d’égal que celle de la salle des fêtes quand tout le monde a quitté le bal. Imaginez.

Je l’ai vu, cette semaine encore. Une audience dans une belle région de France, à 4h de TV de PARIS. Mon client et moi discutons depuis un an de la demande de divorce de son épouse. Un an pendant lequel j’ai essayé à plusieurs reprises d’initier un dialogue avec l’avocat de Madame. Aucune réponse. Le temps passe. La vie continue. Les enfants grandissent un peu. Et un jour, sans que l’on s’y attende, ça tombe : Madame a pris un nouvel avocat qui s’est empressé de déposer une requête en divorce sans même avoir pris la peine de se manifester auprès de moi. L’audience est fixée très vite, et ô surprise, l’épouse n’est pas en phase avec son avocat qui a saisi sans instructions précises, et sans pièces.

Branle-bas de combat. Les époux se parlent mieux entre eux que leurs conseils – ils ont du mérite ! On trouve un accord rapidement.

Arrivée au tribunal pour l’audience de conciliation devant le Juge aux Affaires Familiales. Salle d’attente. Œil morne de la fonctionnaire à l’accueil que je dérange lorsque je me présente. Le confrère me dit l’air satisfait que je vais attendre parce qu’elle a d’autres dossiers à placer avant le nôtre. Pas de privilège pour les avocats qui viennent de barreaux extérieurs – surtout quand ce sont des parisiens. Elle ne parle même pas avec sa cliente. On attend donc. Presque une heure. On nous appelle enfin.

Le JAF, débonnaire. « Maîtres, vous avez 12 minutes parce que j’ai encore 2 affaires et une audience à 14h » (il était 12h10). Ce n’est pas comme s’il s’agissait de statuer sur la séparation, les domiciles, l’argent, les enfants, le couple – rien d’important heureusement, hein ? Ravi d’entendre qu’il y a un accord. Du coup écoute à peine, fait quelques gestes pour qu’on avance, prend nos dossiers, « signez le pv allez allez ! » puis « délibéré au 9 novembre » ; bon finalement c’est passé très vite alors il se force à faire un petit laïus – je me serais crue à un mariage. Je ne suis pas sûre qu’il ait regardé les époux.

Bizarre, bizarre.

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